dimanche 5 octobre 2014

Louis XIV Conditions de vie des marins, colons français - Nos ancêtres étaient à bord vers la Nouvelle-France - Équipe Médicale - Prêtre - Travail du matelot - la mordt Partie 5

Conditions de vie des marins et des colons français
Nos ancêtres étaient à bord des navires vers la Nouvelle-France
Partie 5


L'équipe médicale

Sur un 74 canons français, l'équipe médicale se compose du chirurgien-major, de deux second-chirurgiens, deux aides-chirurgiens et d'un apothicaire.
  Trousse médical durant cette période


Manuscrit du fonds documentaire de la bibliothèque de l'ancienne École de Médecine Navale. Manuel d'anatomie à l'usage des élèves de l'école de médecine navale de Rochefort sur mer, rédigé par Cochon-Dupuy lui-même en 1727.
   
Quelques matelots lui sont affectés comme infirmiers/servants, ainsi que, traditionnellement, le prévôt, c'est-à-dire l'homme chargé des punitions corporelles sur le vaisseau (le bourreau, donc), et ses sbires " hommes à tout faire comment agent de police su un navire de guerre ou un rapporteur officiel " …
 
                                                                Les médecins
 
Ils officient au pont le plus bas du vaisseau, le faux pont relativement à l'abri des coups car situé en dessous de la ligne de flottaison. Il est peint en rouge sang pour que celui des marins blessés se remarque moins. Le chirurgien opère dans sa cabine, souvent à même le sol, dans la quasi-obscurité d'une lampe à pétrole, au milieu des hurlements des blessés et des cris d'agonie des mourants, la fumée et le bruit des canons en toile de fond, une image proche de l'enfer.


Si la chirurgie est encore considérée comme un « art mécanique », les chirurgiens ne sont pourtant plus, au XVIIIe siècle, ces hommes de bonne volonté servant tout à tour de barbier-boucher et aidant à la manœuvre comme on en rencontre encore à cette époque sur les terre-neuvas…


Ouvrage du fonds documentaire de la bibliothèque de l'ancienne École de Médecine Navale. Traité de médecine publié par Jacob Sylvius en 1549.
 
Ils ont enrichi leur bagage intellectuel et se sont « médicalisés », se rapprochant peu à peu du commun des praticiens hospitaliers. Ils sont instruits dans les écoles de Rochefort, Brest et Toulon, et la première des trois à longtemps joué le rôle d'école pilote en matière de santé navale et de médecine tropicale, où les élèves reçoivent une éducation très complète, comprenant même des cours d'obstétrique.
Les barbiers et bouchers exerçaient la médecine pour les pauvres


Il n'y a pas de médecin à bord des vaisseaux, sauf sur le navire hôpital pouvant accompagner la flotte. À ce titre, le chirurgien de bord soigne les diverses affections, fièvres ou maladies de l'équipage et des passagers, établissant à ce titre des diagnostics et prescrivant des remèdes, ce qui leur est formellement interdit par les médecins quand ils sont à terre… 
L'aumônier naval


L'aumônier naval au séminaire de Rochefort, les tâches de l'aumônier naval de la fin du XVIIe siècle tendent à se rapprocher de celles d'un curé ou d'un vicaire, comme s'il desservait une paroisse de mer. À la différence près que l'ordonnance de 1689 précise que la messe se dira non seulement les dimanches et fêtes, mais aussi « les autres jours aussi souvent qu'il sera possible. »

L'aumônerie navale n'attire pas les vocations : d'une part elle s'exerce dans des conditions très précaires et, d'autre part, elle est très loin de la quiétude - même austère - de la vie d'une église et du presbytère attenant : logé dans la batterie basse vers la Sainte Barbe, sa chambre est un réduit de toile entourant une couchette en sapin (son seul luxe par rapport à l'équipage) ainsi qu'un coffre où il range les ornements de l'autel portatif.

                                                 Il reçoit la paye d'un quartier-maître

L'expulsion des jésuites en 1762 aggrave le problème de recrutement après la fermeture des séminaires de Toulon et de Brest. À Rochefort, les jésuites sont remplacés par des récollets qui n'ont pas la même « pointure » intellectuelle que leurs prédécesseurs.

Les textes réglementaires et les rares témoignages nous montrent un homme dont la position semble incommode et difficile à tenir : trop familier avec l'équipage, il devient vite l'objet de mépris des officiers majors ; trop servile vis à vis du « petit monde de la dunette », il reste celui qui enseigne à « l'homme, l'obéissance, au nom de la volonté divine, le soutien moral à l'ordre social et hiérarchique du bord »
 
La situation du chapelain de la Royal Navy ne semble pas meilleure, quand il dit les grâces à la table du capitaine et aide le secrétaire de ce dernier à y faire le service, comme s'il faisait partie de sa domesticité…                                                                                                    
Expulsion des Jésuites en 1760


                                         La maistrance ou école d’instruction navale

Elle entraîne et encadre l'équipage. Le choix judicieux de ces professionnels était l'assurance de revenir à bon port : un navire pouvait supporter un mauvais commandant, se contenter d'un état-major médiocre et embarquer un équipage hétérogène peu rompu à l'exercice de la mer, mais il se trouvait vraiment en mauvaise posture si la maistrance ne se montrait pas à la hauteur de ce qu'on pouvait attendre d'elle.
 
  La marine britannique
                                            
Le premier homme de la maistrance est le master (pilote / navigateur), c'est-à-dire celui qui détermine la route à suivre et choisi les mouillages dans les rades foraines. S'il règne sans partage dans la marine marchande, il est un peu au second sur un Man'o'war où les officiers savent souvent mieux que lui calculer la position exacte du navire, mais il reste indispensable pour sa connaissance de la mer et surtout des atterrages. Le rôle de son homologue français est identique, même si sa place dans la hiérarchie est moindre. On lui adjoint un second et des aides, il donne les ordres au timonier et vérifier l'exactitude des instruments dans la timonerie rentre dans ses attributions.
 
Dans la marine française la position prédominante de la maistrance est dévolue au premier maître ou maître d'équipage. Il est « l'œil et la main du navire qui doit se trouver partout.» Il porte fièrement autour du cou le rossignol, sifflet d'argent qu'il considère comme signe de son grade, ainsi que le porte-voix car le bosco doit pouvoir se faire entendre d'un bout à l'autre du navire. Il est le patron tout puissant de l'équipage et a un rôle technique primordial puisque le garant du bon état des agrès et apparaux du navire, des échelles, haubans, palans, cordages et autres grelins.
Construction navale 1760


Le bosco est un grade à la suite des officiers subalternes, lien entre ceux-ci et l'équipage.    Le nom est issu de bosseman, qui était le contremaître chargé de la bosse, dernier cordage à retenir l'ancre avant de l'immerger. N’agit pas seul puisqu'une vingtaine d'hommes se situent dans sa mouvance. Son second s'occupe du secteur du gaillard d'avant compris entre le mât de misaine et le mât de beaupré. Sous les ordres du premier-maître se trouvent également les quartier-maitres, chacun responsables d'un secteur dans la mâture. Ils sont 15 sur un 74 canons et sont au plus près de l'équipage, qu'ils guident aux manœuvres et désignent pour les multiples corvées.  Les gens du canonnage Ils forment une société à part dans le navire, avec leurs usages, leur hiérarchie en propre et leurs locaux, sévèrement gardés et cadenassés, où seuls eux ont droit de pénétrer.
Le pont d’un navire 74 canons


Les maîtres canonniers sont les responsables techniques à part entière des batteries et de la manutention périlleuse de pesants matériels et des produits inflammables attachés à leur profession.   Seuls sous Louis XIV, ils sont trois sous Louis XV et Louis XVI, aidés par des seconds-canonniers assistés eux-mêmes par des aides-canonniers ou chefs de pièce. On compte un chef de pièce pour deux canons (une batterie ne tire jamais en même temps à bâbord et à tribord). Presque tous sont d'anciens matelots montés en grade et ayant suivi durant une année entière l'école des apprentis canonniers. Malheureusement la guerre exige souvent une formation accélérée des chefs de pièces
 
Les maîtres de métier Ils dirigent de véritables équipes de maintenance qui font du vaisseau une entreprise itinérante de réparation navale, car le vaisseau s'use au fil d'une campagne, ainsi que dans les cas d'avarie ou de casse après une tempête ou un combat. Celui qui domine cette catégorie est le maître charpentier, tout aussi bien considéré que le premier maître, le maître pilote ou le maître canonnier et, dans la Royal Navy, jouit généralement de l'estime et du respect du capitaine commandant.
 
Assisté sur les plus grands vaisseaux de deux seconds et d'une demi-douzaine d'aides, son domaine comprend toutes les parties de bois, du gouvernail à la mâture dans son entier, et leur visite constitue son devoir quotidien. Lui et son équipe sont particulièrement exposés lors du combat puisqu'ils doivent agir, comme les autres combattants sous le feu de l'ennemi où le navire prend des coups : rabouter des espars sur le pont balayé par la mitraille, obturer les brèches avec des planches et des pelardeaux, tâche confiée au maître calfat et à ses aides dans la marine française, ainsi que le contrôle du fonctionnement des pompes et la vérification de la sentine, dont l'odeur doit être de préférence nauséabonde, l'absence d'odeur pouvant être causée par une voie d'eau dans les « coutures » du navire. Le navire possède aussi un maître voilier qui règne sur le plus grande partie du navire: le « phare » atteint
3 240 m2 sur un navire de premier rang.
Canon sur navire

D'autres maîtres ouvriers sont embarqués sur le navire, mais sans avoir le rang d'officier marinier : le maître armurier, un forgeron, un chaudronnier et même un vitrier, ainsi qu'un coq, un boucher et un boulanger dans la marine française …
                                                                                       
Soldats et matelots
 
Le terme matelot vient du néerlandais «mattenoot», qui signifie compagnon de même couche.   Effectivement les matelots partagent à deux le même hamac sans jamais se croiser : quand l'un quitte son service, l'autre le prend, on dit alors qu'ils sont amatelotés. Cela crée une liaison très forte, une solidarité très profonde, une fraternité de gens de mer.

Dire que le matelot est un exécutant voué à la manœuvre du gréement et des ancres est une définition trop étroite pour refléter fidèlement la réalité car ils sont en fait des hommes à tout faire sur le navire : hormis les tâches de manutention et d'arrimage des charges, ils connaissent les rudiments du travail de cordier, de charpentier, de calfat, et savent, pour une bonne partie d'entre eux, coudre une voile.
Matelots

On constate une division verticale du travail: les matelots appelés à travailler dans la mâture, notamment les gabiers, sont désignés aussi sous le nom de « marins de haute paie ». Ils sont l'élite des matelots et représentent le tiers des hommes sur un navire. Les autres, restant sur les ponts, sont moins considérés et moins payés, et sont affectés aux manœuvres exténuantes des palans de voiles.
La manœuvre de la voilure ne justifie pas à elle seule le nombre important d'hommes sur un navire de guerre: 150 hommes suffisent pour manœuvrer un trois-mâts carré de 1,500 tonneau, rien qui justifie donc des équipages de 700 hommes et plus tels qu'on les rencontre sur les navires de premier rang. C'est le service des batteries qui est un véritable dévoreur d'effectifs.  La répartition des postes de combat montre que 77 % des hommes sont affectés aux canons, la force d'un navire de ligne passant avant tout par la puissance de son artillerie.

                                        L'équipage se partage les hamacs

L'apparition de troupes d'infanterie de marine à bord des vaisseaux date de bien avant l'adoption de la formation de combat en ligne de bataille, époque où le combat au corps-à-corps entre flotte est alors prédominant. Toutefois, l'adoption de la ligne ne remet pas en cause la présence de l'infanterie de marine sur les navires, car le combat « à portée de pistolet » ne disparaît pas pour autant, et les décharges nourries de mousqueterie et les projections de grenades à main sont autant de facteurs gênant la manœuvre de l'adversaire. Ils sont également d'un appoint très appréciable en cas d'abordage d'un navire ennemi, en offensive comme en défensive.
Hamac ancien

Les soldats de marine peuvent aider aux cabestans au départ du port et sont aussi affectés au service du canon et à la distribution des munitions. Ils sont également chargés du maintien de l'ordre à bord par des patrouilles et des postes de garde aux points névralgiques du navire (accès à la dunette et à l'armurerie attenante par exemple). Ils peuvent être aussi amenés à réprimer des actes de désobéissance voire des tentatives de mutinerie.
Colbert en créera deux régiments, le Royal Marine et l’Amiral, mais qui, à peine formés seront versés au début de la guerre de Hollande dans l'armée de terre, tout en conservant leur nom, Louvois et les généraux étant opposés à ce que la marine soit dotée de régiments propres. Pour pallier ce mauvais tour, Seignelay forme d'abord des détachements de soldats-gardiens pour surveiller les ports-arsenaux puis obtient la création de compagnies franches de marine (il en créera cent en tout, une force considérable !), chacune comprenant une centaine d'hommes, contrôlée par la marine et payée par le Département de la Guerre. Une compagnie est commandée par un lieutenant ayant reçu une commission de capitaine d'infanterie par le roi, touche de lui 2 écus par recrue et 50 livres mensuelles pour ses frais annexes en plus de son traitement habituel.
 
Lynchage des frères de Witt marque le retour au pouvoir des stathouders
 
Les hommes du rang touchent 9 livres par mois, soit 3 livres de moins qu'un matelot de basse paie. Le soldat de marine est engagé pour 6 ans. La réputation de ces troupes n'est pas fameuse et leur tenue laisse à désirer. Choiseul les supprime donc lors de ses réformes de 1761 : les troupes seront fournies par l'armée de terre. La marine britannique, elle, suit la logique inverse et s'est dotée de son premier régiment de marines dès 1755.

Les compagnies franches sont recréées fin 1774 par la formation d'un Corps Royal d'infanterie de marine comprenant 100 compagnies de fusiliers et 3 de bombardiers (lançant des grenades et aptes à servir le canon) réparties en 3 divisions, au service exclusif des marins et commandé par ses propres officiers.
 
Conditions de vie à bord des navires


« Le vaisseau était une espèce d'enfer flottant.  C'était un âge très brutal. On était habitué aux maladies, aux douleurs, à la brutalité. C'est-à-dire que la vie sur le vaisseau était en quelque sorte le comble de la vie normale pour des gens en ce temps-là. »
   Mort de Louis XIV                                                                   
                                                          Corbillard océanique

Les animaux sont très présents à bord. On y constate d'abord une faune native : outre les puces, scorpions, mille-pattes, cafards et autres insectes parfaitement adaptés à la vie maritime, on y trouve des rats (qui justifient la disparition des vivres). Ces derniers sont avidement pourchassés par l'équipage quand les produits frais manquent complètement car ils ont la réputation de combattre le scorbut car « ils sont en effet parmi les seuls animaux de la création qui fassent eux-mêmes la synthèse de la vitamine C : par conséquent en mangeant du rat, on mangeait un peu de vitamine C, surtout si on mangeait ses abats !»


Suite voir partie 6



Alain Laprise 05 octobre 2014


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