Femme enceinte lapidée: Sharif
exige des «mesures immédiates»
Photo : Agence
France-Presse (photo) Aamir QureshiManifestation ce jeudi à Islamabad contre le
meurtre de Farzana Parveen, 25 ans, qui a été battue à mort mardi à coups de
briques par sa propre famille devant un tribunal en plein centre de Lahore.
Le premier ministre pakistanais Nawaz Sharif a exigé jeudi
des mesures urgentes dans l’affaire de la femme enceinte lapidée par sa famille
et dont le mari a admis avoir tué sa première épouse donnant à ce drame une
tournure shakespearienne.
Farzana Parveen, 25 ans, avait été battue à mort mardi à coups de briques par
une trentaine de membres de sa propre famille devant un tribunal dans le centre
de Lahore, ville de plus de dix millions d’habitants dans la province centrale
du Penjab.
Crime de cette Juliette pakistanaise: s’être mariée par amour à son Roméo local
sans l’assentiment de sa famille dans un pays où les unions demeurent le plus
souvent arrangées.
La police a arrêté le père de Farzana, mais le reste de la famille cavale
encore en liberté.
Le premier ministre Sharif a demandé jeudi aux autorités de la province du
Penjab de «prendre des mesures immédiates» concernant ce
crime «totalement inacceptable» survenu «devant
la police».
Au Pakistan, des lois en vigueur depuis le début des années 2000 interdisent
les mariages forcés et pénalisent les crimes d’honneur, mais se heurtent à des
coutumes ancestrales ou à une interprétation rigoriste de l’islam.
Mais la police refuse le plus souvent d’intervenir dans ces affaires
familiales. Et des associations locales dénoncent des dispositions de la loi
permettant à des meurtriers d’échapper à la justice s’ils paient la «diya»,
le «prix
du sang».
Dans un rebondissement aussi inattendu que macabre, le veuf de Farzana,
Mohammad Iqbal, un fermier de 45 ans, a avoué jeudi avoir tué sa première
épouse, mais avoir justement échappé à la justice en échange du prix du sang.
«J’étais
amoureux de Farzana et c’est à cause de cet amour que j’ai tué ma première
femme... par strangulation», a-t-il déclaré à l’AFP dans un
entretien téléphonique.
Le fils du couple avait à l’époque porté plainte contre son père, mais l’avait
ensuite pardonné après le versement du «prix du sang».
«Iqbal
a tué sa première épouse il y a six ans. Il avait été arrêté, puis relâché
après avoir trouvé un compromis avec sa famille», a confirmé à
l’AFP Zulfiqar Hameed, un responsable de la police enquêtant sur le meurtre de
la jeune Farzana.
En liberté, le meurtrier a convaincu Farzana de l’épouser, mais après un accord
initial, la famille de la jeune femme a exigé le versement d’une dot plus
généreuse, ce que Mohammad Iqbal a refusé, selon ce dernier.
Le couple s’est marié malgré le refus final de la famille de Farzana qui s’est
sentie «déshonorée» par la jeune femme, et non le mari
qui se dit désormais victime de «menaces de mort».
Au Pakistan, près de 1000 femmes ou adolescentes ont été tuées l’an dernier
pour avoir «déshonoré» leur famille, selon la Commission
nationale des droits de l’Homme, qui dénonce «l’impunité» dont jouissent
les auteurs de ces meurtres.
«Le
gouvernement doit prendre des mesures fortes et urgentes pour mettre fin à ce
flux continu de soi-disant — meurtres d’honneur — ...», a déclaré
la Commissaire des Nations unies sur les droits de l’Homme, Navi Pillay. Car «il
n’y a pas la moindre trace d’honneur à tuer une femme...», a-t-elle
ajouté.
Le chef de la diplomatie britannique William Hague s’est dit
«révulsé» jeudi par le «meurtre atroce» de Farzana
Parveen et a exhorté Islamabad à prendre des mesures rapides pour traduire en
justice les auteurs ce crime et juguler cette pratique.
«Il
n’y a absolument rien d’honorable dans les crimes d’honneur et j’en appelle au
gouvernement pakistanais de faire tout ce qui est en son pouvoir pour éradiquer
cette pratique barbare», a-t-il déclaré.
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