Au XVIIe siècle, sur les vingt millions d'habitants que compte la France, un sur deux
est un ouvrier agricole, sans autre bien qu'un lopin de terre de quelques ares.
Bien loin des grandes propriétés des nobles de la France d'en haut.
L'ouvrier agricole habite généralement une maison d'une seule pièce, parfois partagée avec une autre famille. A l'intérieur, des paillasses sur le sol en terre battue, une cheminée où pend la crémaillère, une armoire où il range sa vaisselle en terre cuite, ses chemises de chanvre, quelques draps et des couvertures de laine. Dehors, un cabanon avec quatre ou cinq poules, deux ou trois brebis que les enfants mènent paître sur les terrains communaux ; elles sont élevées pour la laine et la reproduction, pas question de les abattre pour la viande. Attenant à la maison, un potager, où l'on cultive quelques légumes (choux, fèves ou bettes, lentilles, pois ou navets).
L'ouvrier agricole habite généralement une maison d'une seule pièce, parfois partagée avec une autre famille. A l'intérieur, des paillasses sur le sol en terre battue, une cheminée où pend la crémaillère, une armoire où il range sa vaisselle en terre cuite, ses chemises de chanvre, quelques draps et des couvertures de laine. Dehors, un cabanon avec quatre ou cinq poules, deux ou trois brebis que les enfants mènent paître sur les terrains communaux ; elles sont élevées pour la laine et la reproduction, pas question de les abattre pour la viande. Attenant à la maison, un potager, où l'on cultive quelques légumes (choux, fèves ou bettes, lentilles, pois ou navets).
Ces manouvriers, comme on les appelle alors, ne possèdent
que de rares outils à main, une bêche et une faux, voire simplement une fourche
de bois et une faucille. De mai à octobre, ils vont sur les domaines des
nobles, du clergé ou chez les laboureurs, ceux qui possèdent des terres, un
cheval et une charrue, se louer pour aider à la moisson, aux foins, à la
vendange. Journées épuisantes où hommes, femmes et enfants, cassés en deux
pendant des heures, s'échinent à scier, couper, lier, entasser. Du moins,
peuvent-ils être assurés de manger à leur faim. Le reste de l'année, le
manouvrier offre ses services comme maçon de terre, couvreur de chaume,
débardeur de bois ou charbonnier, tandis que sa femme tisse à domicile pour un
marchand de toile.
Le repas des paysans consiste presque exclusivement en un
pain, mélange de seigle et de blé, dont on consomme 700 grammes par jour et par
personne, trempé dans une soupe de légumes cuite lentement dans le pot de terre
accroché à la crémaillère. Chacun y plonge des morceaux du pain que,
traditionnellement, le père de famille rompt au début du repas. Un repas à
peine agrémenté par quelques oeufs et, selon les provinces, par une galette de
sarrasin, une bouillie de maïs ou une purée de châtaignes. Presque jamais de
viande ni de laitages, d'où une carence en graisses dont on aurait grand
besoin, surtout l'hiver pour lutter contre le froid. Au dessert, selon la
saison, un fruit, des baies, quelques tartines frottées d'ail ou trempées dans
du cidre. La chasse et la pêche sont réservées au seigneur, mais certains se
risquent à braconner pour ramener un lapin ou un peu de poisson.
Presque partout les terres arables sont réservées à la
culture des céréales (seigle, blé, orge,
avoine, millet, maïs). L'élevage reste rare, sauf celui du cheval ou du mulet.
Aucune autre machine agricole que la charrue. Aussi, à l'exception des labours,
tout le travail des champs reste manuel. Or semer à la main prend du temps et
la pluie interrompt souvent les semailles, qu'on n'a pas toujours le temps de
terminer avant l'hiver, ce qui rend les récoltes aléatoires. D'autant que,
faute d'insecticides, les semis restent exposés aux rongeurs et aux maladies.
On moissonne à la faucille ; même en embauchant les jeunes enfants, la famille
du laboureur ne suffit pas à la tâche, aussi fait-on appel aux manouvriers.
Le rendement (le rapport de la récolte aux semences) est en
moyenne de quatre ou cinq grains récoltés pour un grain semé, mais sur les
mauvaises terres, ou pendant les années de disette, il peut tomber à trois pour
un: si l'on déduit de la récolte le montant des impôts et la réserve de grains
nécessaire à l'ensemencement de l'année suivante, il ne reste rien pour nourrir
une famille.
Ces années-là, lorsque l'humidité empêche les grains de
mûrir et que la moisson se révèle mauvaise, les laboureurs préfèrent moissonner
uniquement avec l'aide de la main-d’œuvre familiale. Le chômage s'ajoute alors
à l'envolée des prix des céréales, et le manouvrier en est réduit à envoyer
d'abord ses enfants mendier aux portes des couvents et des villes, puis, la
misère s'accentuant, les parents prennent eux-mêmes la route et finissent par
constituer de petites troupes de chapardeurs, voire de vrais brigands, ou, pour
les hommes, par se faire enrôler comme soldats du roi.
Si les paysans les plus aisés, les laboureurs,
semblent manquer de charité chrétienne, c'est que, depuis les guerres de
Richelieu, ils sont écrasés d'impôts, devenus la principale cause de misère. Le
clergé, la noblesse, les titulaires des offices en sont exempts ; les impôts
retombent entièrement sur le peuple, surtout celui des campagnes. La taille
absorbe en moyenne 20 % du revenu des paysans. En y ajoutant la gabelle, les
aides, la dîme due au clergé (qui varie de 3 % à 12 %), les droits
seigneuriaux, etc., la moitié environ du revenu paysan est ponctionnée par
l'impôt. De quoi décourager les plus entreprenants : à quoi bon, en effet,
travailler davantage, pour engraisser les agents du fisc ?
On ne croit pas plus aux révoltes, l'agitation paysanne
diminue sous Colbert. Sa mandature ne connaît en effet que deux émeutes, l'une
en Vivarais, en 1670, l'autre en Bretagne, en 1675.
Dans le Vivarais, le bruit a couru que deux nouveaux impôts
allaient être établis, l'un sur les chapeaux, l'autre sur les naissances. Après
avoir écrasé la révolte, les mousquetaires pendent quelques centaines de
montagnards cévenols et en envoient d'autres aux galères. En Bretagne, la
révolte des Bonnets rouges contre le papier timbré est tout aussi aisément
réprimée. « Nos pauvres Bas-Bretons, écrit Mme de Sévigné, s'attroupent par les
champs et, dès qu'ils voient les soldats, ils se jettent à genoux et disent mea
culpa : c'est le seul mot de français qu'ils sachent... On ne laisse pas de les
pendre, jusqu'à quatorze au même arbre. Ils demandent à boire et du tabac, et
qu'on les dépêche. »
La quasi-totalité des revenus du manouvrier est dépensée
pour subvenir aux besoins en nourriture. Il ne reste donc pas grand-chose pour
acheter du linge, de l'huile pour s'éclairer, et un morceau de lard pour les
jours de fête. Car, dans cette existence désespérément triste, de loin en loin,
la fête de village met une note de gaieté. Ce jour-là, on mange des crêpes ou
des galettes, avec du lard et des châtaignes. Sur la place de l'église, au
milieu des gueux, des colporteurs et des arracheurs de dents, on prend plaisir
à regarder un acrobate, à écouter jouer du hautbois, de la flûte ou de la
cornemuse. On danse le menuet, le branle ou la courante, tandis qu'un aveugle
joue du violon ou chante une complainte. Mais il se trouve toujours quelque
capucin ou cordelier pour rappeler la crainte de l'enfer.
Vie des paysans
Après vingt-cinq ans de répit relatif, correspondant à peu
près au ministère de Colbert, la France d'en bas renoue avec le malheur. Ce
n'est plus la peste ou la révolte contre le fisc, comme sous Richelieu, mais la
disette. En 1686, au mois de mars, l'intendant du Poitou note : « Les habitants
sont obligés de manger de l'herbe bouillie », et celui du Languedoc : « Il y a
une misère extrême dans les Cévennes, parce que le blé et les châtaignes y ont
manqué et beaucoup de paysans ne vivent à présent que de glands et d'herbe. »
Pire encore! La récolte médiocre de 1692 est suivie à l'automne de pluies
diluviennes qui détruisent les semailles et provoquent, en juillet 1693, une moisson
désastreuse. « La misère et la pauvreté sont au-delà de ce que vous pouvez
imaginer, écrit le lieutenant général en Normandie. Dans le pays de Caux, une
infinité de peuple meurt fréquemment de faim. Il est à craindre que le peuple,
qui ne mange que des herbes, ne coupe et ruine tous les blés avant qu'ils ne
soient mûris. » Des spéculateurs accaparent le grain, de sorte que son prix va
jusqu'à quintupler.
A chaque disette, marginaux, infirmes, malades, veuves sans
ressources, paysans dépossédés de leur terre affluent vers les villes pour y
trouver assistance. Mais, éconduits par les bureaux des pauvres, qui réservent
leurs aumônes aux gens du cru, ils sont dûment enregistrés et pourvus d'un
signe distinctif ; ils échouent alors dans les faubourgs des villes. Oubliant
son devoir de charité, la société prend peur devant ces vagabonds indésirables,
oisifs, asociaux, fauteurs de troubles ou porteurs d'épidémies.
Aussi, tant pour assurer le salut des âmes que par mesure de
police, Mazarin promulgue, en
1656, un édit de grand renfermement, confirmé par Colbert quelques années plus
tard. Tous les démunis de Paris sont, de gré ou de force, internés dans un
hôpital général, qui compte bientôt trois établissements, la Salpêtrière,
Bicêtre et la Pitié, et plus tard l'hospice des Enfants trouvés. Le régime de
Bicêtre, réservé aux hommes, ressemble à celui d'une maison de redressement :
les plus violents reçoivent le fouet ou sont mis aux fers. Au moins, chacun y
mange à sa faim, un privilège.
Ces mesures d'enfermement ne choquent guère à l'époque. «
Les pauvres étant nés tels ou étant réduits à cette condition par l'ordre de la
Providence, disait l'évêque de Grasse, ne doivent pas songer à vivre ni
abondamment ni délicieusement. Ce n'est leur ôter la liberté que de les
enfermer, c'est leur ôter leur libertinage. »
Durant l'hiver 1693,
l'Hôtel-Dieu de Paris voit chaque jour mourir de faim plusieurs centaines de
personnes. D'autres, faute de lit, périssent en pleine rue. La Reynie,
lieutenant général de la police, tente de
Hôtel-Dieu de Paris en 1693
prévenir d'éventuelles émeutes en faisant construire une
trentaine de grands fours dans la cour du Louvre pour y cuire chaque jour 100
000 rations de pain vendues deux sous la livre. La vente s'effectue en cinq
endroits: le Louvre, la place des Tuileries, la Bastille, le Luxembourg et rue
d'Enfer. On se dispute, on se bat, on s'écrase pour acheter ce pain vendu à
perte. Une bourgeoise qui, par curiosité, était allée voir la distribution du
pain périt étouffée.
Pour la seule année 1694, un million de Français meurent de faim, de froid ou de
misère. On ne s'étonnera donc pas que Charles Perrault ait conté en 1697, dans
Le Petit Poucet, la triste histoire d'un couple de pauvres bûcherons qui, ne
pouvant plus nourrir ses sept enfants, va les perdre dans la forêt. En deux ans
(1693 et 1694), le royaume voit son nombre d'habitants diminuer de 1 500 000
personnes, soit 6,8 % de la population. Du jamais vu depuis la peste noire.
A Rodez, la municipalité, incapable de nourrir les errants,
leur ferme les portes de la ville. Alors ils creusent à plusieurs reprises des
galeries sous la porte proche de l'hôpital, qui leur semble un havre ; et,
chaque fois, la ville comble les brèches pour leur interdire cette entrée
clandestine. A Clermont, on expulse les mendiants et les malades couchés dans
les rues, qui dégagent une odeur infecte, et l'on jette de la chaux vive sur
les cadavres avant de les jeter dans une fosse commune.
En 1709, Paris connaît l'hiver le plus rigoureux de son
histoire. Le 6 janvier, la température chute de 20 °C et, pendant dix-huit
jours, reste en dessous de - 10 °C. La Seine gèle, comme la Loire, la Garonne,
et même la mer dans le Vieux-Port à Marseille. Les curés enterrent des malheureux
« pris par la gelée qui leur a sans doute gelé le sang ». Dans la capitale, on
allume des feux à deux cents endroits afin d'apporter une source de chaleur aux
pauvres.
Et, lorsque monte le prix du pain, les étoffes ne se vendent
plus, la clientèle réservant le moindre sou à l'achat de nourriture. Les
fabricants arrêtent leurs métiers et mettent leurs ouvriers au chômage : c'est
« le silence des métiers ». La capitale doit alors ouvrir des chantiers de
terrassements pour proposer un peu de travail et de pain aux chômeurs. A 4
heures du matin, ils sont six mille à se présenter là où l'on en attendait deux
mille.
Pour cette période 1709-1710, la France dénombre 100 000
morts de froid, 100 000 morts de faim, auxquels s'ajoutent 50 000 morts
d'épidémie. Une catastrophe ! « Votre peuple, Sire, que vous devriez aimer
comme vos enfants, et qui vous a toujours été si dévoué, est en train de mourir
de faim, écrit Fénelon à Louis XIV. Plutôt que de le saigner à blanc, vous
feriez mieux de le nourrir et de le chérir; la France entière n'est plus qu'un
grand hôpital désolé et sans provisions. Vos sujets croient que vous n'avez
aucune pitié de leurs souffrances, que vous n'avez d'autre souci que le pouvoir
et la gloire. »
La Reynie nettoie Paris
Au début du règne de Louis XIV, les rues de Paris sont bien
pavées mais démunies de trottoirs et les piétons se font constamment
éclabousser. Pire encore, ils reçoivent sur la tête le contenu des vases de
nuit ! A la saleté s'ajoute l'insécurité. Les 300 archers du guet ne suffisent
pas à maintenir l'ordre. Mécontent que Paris ait la réputation de la ville la
plus sale d'Europe, Louis XIV charge Colbert de créer un service de voirie.
Colbert nomme un lieutenant général de police, Nicolas de La Reynie, doté de pouvoirs équivalents à ceux d'un préfet de police. Sitôt dans ses nouvelles fonctions, il recense toutes les maisons de la capitale et institue une taxe d'assainissement. Les habitants doivent nettoyer le devant de leur maison et ont obligation de placer leurs déchets dans un tombereau dont le passage est signalé par une cloche. Il améliore la sécurité en faisant installer 5 000 lanternes dans les rues de Paris, que l'on surnomme déjà "Ville lumière". La Reynie, inflexible et efficace, conservera son poste pendant trente ans.
La dernière grande famine de l'Ancien Régime 1693-1694
En 1693 et 1694, deux années terribles, près de 1,7 million
de Français trouvent la mort. Autant que durant la Première Guerre mondiale,
mais pour une population deux fois moindre. C'est la grande purge des miséreux
que la cherté du pain jette sur les chemins pour y mendier et qui meurent au
hasard de leur errance.
Les 25 ans qui vont de 1690 à la mort de Louis XIV constituent le versant sombre du règne du Roi-Soleil. Les guerres s'enchaînent : celle dite «de la Succession d'Espagne» (1702-1714) vient juste après la déjà très meurtrière guerre de la ligue d'Augsbourg (1689-1697).
Mais les pertes militaires pèsent peu à côté des mauvaises
récoltes à répétition que provoquent étés pluvieux et hivers glaciaux. Mal
nourries, quand elles ne meurent pas littéralement de faim, les populations
sont la proie de maladies endémiques qui se transforment alors en épidémies,
telle la redoutable dysenterie. En 1693-1694, tout concorde pour donner lieu à
la plus grave crise de subsistance de l'Ancien Régime.
La vie précaire
Dans la France de l'époque, on ne meurt généralement pas de
faim. En année normale, la population est à peu près convenablement nourrie,
même si l'immense masse des humbles se contente d'une tranche de pain trempée
dans un potage de légumes — «la soupe» —, qu'un morceau de lard parfume parfois
et où manque encore la pomme de terre... Mais l'agriculture, avec ses
rendements dérisoires, reste un exercice précaire qui, chaque année, rend
redoutable la période dite «de la soudure», celle où, aux environs de mai les
réserves de l'armée passée s'épuisent alors que le blé sur pied n'est pas
encore prêt à être moissonné.
En 1693 après plusieurs mauvaises années, la récolte s'avère très médiocre : aux Halles de Paris, en juin, un pain d'une livre coûte à un ouvrier l'équivalent d'une journée de travail. L'hiver qui suit est exceptionnellement rude et les organismes affaiblis par la malnutrition supportent mal les basses températures : on meurt en abondance dans toutes les villes de France. Puis survient le printemps, désespérément sec, au moment où l'on attend des pluies pour nourrir les semences. Une partie des vivres disponibles est réquisitionnée pour les besoins de l'armée des Flandres; le reste est acheté en hâte par des spéculateurs qui misent sur le renchérissement des cours. Une tension s'installe entre les provinces, peu soucieuses de laisser partir leurs grains, et le pouvoir central, qui craint la fureur des Parisiens et se soucie de constituer des stocks.
L'effroyable famine
Dans la capitale, cependant, à l'été 1694, l'heure est à
l'angoisse et non encore a la colère À l'initiative des clercs, de longues
processions se forment autour de la chasse de sainte Geneviève, patronne de la
cite. Sur ordre de la municipalité et appointes par elle, des «chasse-gueux» se
chargent d'expulser les pauvres; il en va ainsi également dans la plupart des
villes de France. Condamnes a l'errance, les malheureux se jettent dans les
champs sur le blé encore vert et le dévorent : il faut instituer un système de
surveillance des récoltes. Mais la situation des campagnes n'est pas meilleure
: dans bien des régions, en particulier dans le Massif central - le Limousin et
l'Auvergne sont particulièrement touches —, de nombreux paysans quittent leurs
villages et se lancent à leur tour sur les routes, tachant, a force de mendier,
de gagner les villes ou ils espèrent trouver de la nourriture...
Quand toutes les céréales sont épuisées- le froment, le
seigle, l'avoine après le blé -, es pauvres se trouvent réduits à recueillir
les glands ou les fougères pour en faire une sorte de pain. Ces «méchantes
herbes» achèvent de ruiner la santé des malheureux, qui enflent après y avoir
eu recours. Les orties, les coquilles de noix, les troncs de chou, les pépins
de raisin moulus n'ont pas meilleur effet. Les curés, qui nous renseignent sur
ces tristes expédients, parlent aussi des bêtes, (qu’on ne nourrit plus et qui
meurent avant les hommes : les charognes de chiens, de chevaux et «autres animaux
crevés» sont consommées en dépit de leur état de pourriture des sources
indirectes mentionnent des cas de suicides et d'autres, plus rares,
d'anthropophagie.
Durant tout l'été 1694, la chaleur, qui accélère la
putréfaction des milliers de cadavres sur les chemins, est responsable de
graves épidémies. La typhoïde, notamment, propagée par l'eau et les aliments
souillés, achève ceux qui ont réussi à se nourrir un peu. Les organismes,
affaiblis, sont moins féconds : la natalité, loin de compenser le nombre des
morts, fléchit durant tous ces mois. C'est la dernière grande famine de
l'Ancien Régime, terriblement meurtrière : elle légitime le nom qu'un historien
a récemment donné à cette période sombre, «les années de misère».
Le pain est, pendant toute, l'époque moderne, le fondement
même de la nourriture et sa composante essentielle, Que le blé vienne à
manquer, et c'est la famine.
L'horrible menu
Mort à l'automne de 1694, le prêtre stéphanois Jean Chapelon
a mis en vers la triste litanie des nourritures dont doivent se contenter ses
contemporains durant la famine : « Croiriez-vous qu'il y en eut, à grands coups
de couteau, l'ont disséqué des chiens et des chevaux. Les ont mangés tout crus
et se sont fait une fête. De faire du
bouillon avec les os de la tête. Les gens durant l'hiver n'ont mangé que des
raves et des topinambours, qui pourrissaient en cave, de
la soupe d'avoine, aux trognons de chou. Et mille saletés qu'ils trouvaient dehors, jusqu'à aller les chercher le long des Furettes [le marché aux bestiaux], Et se battre leur soûl pour ronger des os. Les boyaux des poulets, des dindons, des lapins, étaient pour la plupart d'agréables morceaux. »
Cité par M. Lachiver, les Années de misère/ Paris, Fayard, 1991.
la soupe d'avoine, aux trognons de chou. Et mille saletés qu'ils trouvaient dehors, jusqu'à aller les chercher le long des Furettes [le marché aux bestiaux], Et se battre leur soûl pour ronger des os. Les boyaux des poulets, des dindons, des lapins, étaient pour la plupart d'agréables morceaux. »
Cité par M. Lachiver, les Années de misère/ Paris, Fayard, 1991.
Paysage d'hiver (peinture de J. Montrer le Jeune,
Châlons-sur-Marne, musée des Beaux-arts). A la fin du XVle siècle et au
commencement du XVlll, le refroidissement du climat, qui a fait parler de
«petit âge glaciaire», eut des conséquences catastrophiques sur l'agriculture.
Le petit âge glaciaire
La famine de 1693-1694 est la conséquence de la dégradation
climatique qui s'observe dans les 10 ans qui précèdent et qui suivent le
tournant du siècle.
Entre 1690 et 1710, en effet, la France, et avec elle une large partie de l'Europe, connaît une détérioration sensible du régime des températures et des précipitations, marquée par un refroidissement important des hivers et par des étés «pourris». L'étude de l'avancée des glaciers dans les vallées alpines aussi bien que le témoignage des contemporains ont inspiré aux historiens l'expression de «petit âge glaciaire». Sans rien de commun toutefois avec les grandes glaciations préhistoriques, cet abaissement des températures aurait commencé vers 1560 pour ne prendre fin qu'aux environs de 1850.
Entre 1690 et 1710, en effet, la France, et avec elle une large partie de l'Europe, connaît une détérioration sensible du régime des températures et des précipitations, marquée par un refroidissement important des hivers et par des étés «pourris». L'étude de l'avancée des glaciers dans les vallées alpines aussi bien que le témoignage des contemporains ont inspiré aux historiens l'expression de «petit âge glaciaire». Sans rien de commun toutefois avec les grandes glaciations préhistoriques, cet abaissement des températures aurait commencé vers 1560 pour ne prendre fin qu'aux environs de 1850.
Le creux est atteint entre 1687 et 1700 avec des moyennes
inférieures de 1,5 °C à celles de la décennie précédente — soit une différence
considérable. Plus terrible encore que celui de 1693-1694, l'hiver de 1709-1710
reste longtemps dans les mémoires : le vin gèle jusque sur la table du roi. Le
froid atteint -25 °C en rase campagne et, dans les masures paysannes en
torchis, il ne fait guère plus de 0°C. Puis la neige protectrice fond,
découvrant la terre nue, qui gèle de nouveau quelques jours après... Néanmoins,
il n'y a cette fois «que» 200 000 à 300 000 morts, victimes du froid ou de la
faim
Nos ancêtres sous l’ancien régime
Au XIIIe, les paysans sont le plus souvent des serfs,
c’est-à-dire qu’ils sont sous la protection d’un seigneur, qui possède un
domaine où ils vivent, les paysans louent la tenure (terre de 10 à 20
hectares). En contrepartie, les paysans doivent des taxes, des redevances à
leur seigneur. Les serfs ne sont pas des esclaves, et n’appartiennent pas au
seigneur, ils appartiennent à la terre, ou au fief, et ne peuvent en être
chassés. Dans les guerres, les paysans sont les premiers touchés, les
adversaires voulant affaiblir le seigneur en tuant en premier ses serfs… Il
arrivait parfois que le seigneur seulement occupé par les loisirs de la chasse,
piétine les champs sans scrupules.
Vie quotidienne
La vie des paysans au XIIIe siècle et pendant tout l’ancien
régime ne fut sûrement très difficile , et fut même très dure à certaines
périodes de maladies ou de famines. Leurs habitations étaient fréquemment
misérables, la pauvre nourriture en faibles quantités, et les vêtements, si on
peut les appeler comme cela, étaient vraiment de mauvaise qualité pour les plus
pauvres.
Les habitations
Les paysans et leur famille habitaient de modestes demeures.
Construites en bois ou en boue séchée, les maisons du village étaient couvertes
d’un toit de chaume. Elles n’avaient généralement qu’une seule pièce, mal
éclairée par de petites fenêtres sans vitres et fermées de volets de bois le
soir.
Ces modestes maisons étaient composées d’une seule et grande
pièce à vivre, avec un sol en terre battue. Un feu se tenait au centre de cette
salle, entouré de bancs en bois ou en pierre. Les occupants dormaient tous dans
le même lit en paille pour se tenir chaud en hiver, les habitations étant très
mal isolées. Il n’y avait généralement pas de table à manger, mais une planche
posée sur des tréteaux.
La légende du lit clos
Les lits clos ont été conçus pour se protéger des
loups...Autrefois dans les villages et les fermes, on dit que ces bêtes
pénétraient dans les maisons, s'emparaient des nourrissons endormis dans leur
berceau auprès du feu et les emportaient. C'est pourquoi les paysans et les
fermiers, pour la sauvegarde de leurs petits enfants, les enfermaient dans les
lits clos et barraient la porte avant d'aller aux champs. C'est aussi une
protection contre les porcs qui fourrent partout leur groin indistinctement, et
les poules rapaces qui entrent et sortent des chaumières sans arrêt et ne
regardent pas à deux fois ce qu'elles déchirent ou crèvent : un cil, une
oreille, un petit pied, une petite main.
Les vêtements
Les paysans ne se souciaient pas de ce que leurs vêtements
soient beaux, mais qu’ils tiennent chaud et qu’ils soient pratiques. Les
vêtements d’hiver sont souvent superposés pour protéger davantage du froid; les
hommes et les femmes portent le même type d’habits. La plupart du temps, les
paysans on la tête couverte, soit par une cal ou par un chapeau; soit par un
chaperon en hiver. Ils portent une tunique, avec des braies ( culottes longues
pour les hommes ), il leur arrive de porter une cape de lin par-dessus,
lorsqu’il fait frisquet.
La nourriture
Les paysans ne consomment pas de nourriture très variée: la
plupart du temps, ils se nourrissent de galettes, de bouillies de céréales
telles que l’orge ou le seigle. Le pain gris de seigle est un élément
essentiel, la base de l’alimentation paysanne, chaque personne en consomme 1Kg
par jour, lorsqu’ils le peuvent bien sur; la soupe de légumes est également un
composant important de leur alimentation. Les paysans riches tuent en général
un porc au début de l’hiver puis le conservent dans le sel, ce qui leur donne
le lard pour les jours de fête.
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